Un « bonjour » en français déclenche une tempête linguistique en Belgique

En Belgique, un simple mot de bienvenue peut devenir un casus belli. Lorsqu'un contrôleur de train ose dire "bonjour" en région flamande, cette marque de politesse banale se transforme en affaire d'État, ravivant des tensions linguistiques historiques.
Quand la langue devient un champ de bataille
Tout commence avec Ilyass Alba, chef de bord à la SNCB (l’opérateur ferroviaire belge). Durant un trajet vers Vilvorde, en Flandre, il entame son annonce en néerlandais – comme le prévoit la loi – avant d’ajouter un innocent « bonjour » en français. Ce qui semblait être une attention cordiale va pourtant déclencher une polémique inattendue.
En Flandre, la législation linguistique est implacable : toute communication officielle doit être exclusivement en néerlandais. Pour certains passagers, ce petit mot francophone, bien qu’amical, représente une violation des règles. La réaction ne se fait pas attendre : dépôt de plainte officiel. Oui, pour un simple salut.
Une plainte qui fait tache d’huile
La Commission permanente de contrôle linguistique (CPCL) donne suite à la réclamation, rappelant que dans l’espace public, la langue relève du droit, pas de la courtoisie. L’instance précise même que « l’approche client » ne saurait justifier le moindre écart à la réglementation.
Stupéfait, Ilyass Alba s’exprime sur les réseaux sociaux : « Comment en arrive-t-on à une telle rigidité ? Où est passée l’ouverture aux autres ? » Son cri du cœur trouve un écho massif parmi les internautes belges… et bien au-delà des frontières.
Le reflet d’une fracture nationale
Pour saisir la portée de cet incident, il faut plonger dans l’histoire mouvementée des relations entre la Wallonie francophone et la Flandre néerlandophone. En Belgique, la langue dépasse largement le cadre linguistique : elle incarne des identités, des revendications politiques, des siècles de cohabitation parfois tendue.
Ce « bonjour » malheureux devient ainsi le symbole d’un système hyper régulé où chaque syllabe est potentiellement explosive. Pourtant, l’intention du contrôleur était des plus simples : créer un moment de connexion humaine par-delà les barrières linguistiques.
Quand la loi étouffe le bon sens
Heureusement, la SNCB a finalement classé l’affaire sans sanctionner son employé. Une décision apaisante, même si les questions soulevées restent brûlantes. Car au-delà du cas particulier, c’est tout un équilibre qui est interrogé : comment concilier respect des règles et humanité au quotidien ?
Dans un pays où l’on traverse les frontières linguistiques en moins d’une heure, est-il vraiment raisonnable d’interdire toute forme de bilinguisme spontané ? Et si ces petits mots d’accueil, loin d’être des provocations, pouvaient au contraire tisser des ponts entre communautés ?